Le Conseil de Paris de lundi et mardi doit autoriser le démarrage de la rénovation pour le mois de mai.
Depuis neuf ans, on parle du réaménagement des Halles mais, à part les riverains, plus personne ne sait de quoi il retourne vraiment. «Le projet des Halles avance. C'est un sujet très complexe, mais nous sommes dans les temps», a assuré hier Anne Hidalgo, première adjointe au maire Bertrand Delanoë chargée de l'urbanisme, lors de la conférence de presse précédant les sessions du Conseil de Paris. À l'ordre du jour, mardi : le bilan de la commission d'enquête publique, qui avait donné en janvier un avis favorable mais l'avait assorti de trois réserves. Celles-ci doivent être levées par la réponse positive de l'Hôtel de ville et les travaux pourront commencer.
Le premier coup de pioche doit être donné dans le jardin en mai. Les architectes David Mangin et Philippe Raguin ont redessiné cette parcelle de 4,3 hectares, y prévoyant trois nouveaux parcs, deux nouveaux jardins d'aventures, pour les tout-petits (2-6 ans) et pour les préadolescents (7-12 ans), confiés à Bernard Chapuis et Georges Vafias (agence AEP) et à Henri Marquet et Imaginal, et un troisième pour lequel la Ville doit relancer un appel d'offres.
La polémique fait rage. Faire du jardin une priorité semble aller en dépit du bon sens du projet qui entend «résoudre les dysfonctionnements du site» liés à la vétusté et à l'insécurité des espaces publics, notamment des voiries souterraines. Certains invoquent, à deux ans de la présidentielle, une logique électoraliste de la part de Bertrand Delanoë, qui a fait des Halles un chantier phare de son mandat.
La contestation se concentre sur le jardin d'aventures Lalanne, un bijou horticole fané voué à la démolition. Ironie du calendrier, ses auteurs Claude et François-Xavier Lalanne sont exposés au Musée des arts décoratifs jusqu'au 4 juillet. Jacques Boutault, maire (Vert) du IIe arrondissement, concède sur son blog : «On comprend mieux, lorsqu'on connaît l'emprise des travaux de la Canopée des Halles, pourquoi le jardin Lalanne doit être sacrifié. L'emplacement de la future cité de chantier occupe largement sa surface et même au-delà.»
C'est dans cette cité de chantier que sera assemblée, au sol, la Canopée qui couvrira le forum (voir les images), toit de verre ondulant et de vantelles d'acier, haut de 14,5 mètres, à ce jour, signé Patrick Berger et Jacques Anziutti. Mais l'association de riverains Accomplir, et le maire du Ier arrondissement Jean-François Legaret (UMP) n'entendent rien lâcher. Les premiers envisagent un recours au tribunal administratif contre le permis de démolir du jardin.
Jean-François Legaret, lui, va plus loin : il attaquera, lundi, l'illégalité du permis de démolir du maire de Paris devant le préfet pour vice de forme. L'élu, également président de la commission des finances du Conseil de Paris, saisira aussi l'architecte des Bâtiments de France, car «le projet est situé dans le périmètre de protection d'un monument historique», en l'occurrence l'église Saint-Eustache.
Les transports, c'est ce dont on parle le moins et qui est pourtant l'opération principale : 700 000 voyageurs transitent chaque jour par les Halles. Soit 200 000 de plus que lors de la création de la salle d'échange RER, il y a trente ans. «En sous-sol, il faut démolir beaucoup de choses, le planning général implique d'énormes travaux dans les voiries souterraines de mise en conformité aux normes de sécurité mise en place depuis le drame du tunnel du Mont-blanc», indique Dominique Hucher, de la société d'économie mixte SemPariseine, mandataire pour la Ville de Paris. En particulier, le projet prévoit de nouveaux accès aux espaces souterrains du forum.
La mini-autoroute sous le Forum des Halles devrait disparaître. «L'appel d'offres sera lancé en juin pour des travaux devant démarrer en février 2011», indique Dominique Hucher. Enfin, troisième volet : la Canopée. «Ce n'est pas une simple restauration cosmétique», avertit Anne Hidalgo. En effet, il s'agit de démolir les pavillons Willerval déjà jugés comme un modèle «d'architecture éphémère» il y a trente ans. Ce chantier doit démarrer fin 2011.
La Canopée doit recouvrir l'ensemble du forum sur lequel une sortie est prévue, alors qu'il n'en existe aucune à ce jour. Le Forum des Halles comptera alors quatre sorties et l'escalier mécanique dévalant trois étages de la porte Lescot, jugé «trop anxiogène» sera scindé en trois. D'autres escaliers étant prévus pour descendre jusqu'aux sous-sols jusque-là non desservis.
Sous cette Canopée doivent cohabiter, comme aujourd'hui, des boutiques qui resteront ouvertes pendants les travaux et des équipements publics en partie déménagés.
Les travaux coûteront 760 millions d'euros, dont les deux tiers sont à la charge de la Ville, et le tiers restant étant partagé entre ses partenaires : la région, le Syndicat des transports d'Ile-de-France, la RATP et Unibail, société qui gère le Forum. «On crée beaucoup plus d'équipements publics qu'il n'y en avait auparavant, assure Anne Hidalgo. Quoi qu'il en soit, les Halles ont toujours été le ventre de Paris où le commerce a été au cœur du lieu.» Au total ces grands travaux dureront six ans.
Contrairement à ce que l'on pourrait croire, le futur toit du Forum des Halles ne sera pas imperméable. En principe, les armatures métalliques qui quadrillent cette toile de verre pourront être orientées, voire resserrées, afin d'éviter les courants d'air violents, notamment au niveau de la sortie par le jardin. Mais les passants du Forum risquent tout de même d'être arrosés par la pluie, car la Canopée n'est pas étanche. De quoi apporter de l'eau au moulin des détracteurs de ce projet, qui reposera sur les fondations de tours jamais érigées mais souhaitées par Valéry Giscard d'Estaing, qui voulait faire des Halles un mini-Manhattan.
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