Depuis 2004 et son mobilier carbonisé, ce jeune Néerlandais nous surprend à chaque collection. Devenu une star du design, il refuse toujours de commenter ses intentions.
À 31 ans, l’Allemand qui vit aux Pays-Bas vient d’être sacré Designer de l’année 2009 à Design Miami, en Floride. Une distinction précoce, mais pas si surprenante au regard des pièces d’exception qui jalonnent son parcours depuis l’école. La Tools Galerie lui ouvre grand ses portes jusqu'au 23 janvier 2010 !
A rebours des designers du « off » qui choisissent, en marge du Salon du meuble de Milan, le cadre propret d’une boutique pour improviser une galerie, Maarten Baas a préféré investir, en avril dernier, un lieu joliment plus destroy : un atelier de réparation de voitures, Autoriparazione Voghera, via Voghera 8. De ce décor foutoir, criant de vérité et maculé de cambouis, émergeaient, telles des pépites d’or, ses meubles “Smoke”, “Clay” et “Sculpt” ainsi que des nouveautés. Parmi celles-ci, les “Chinese Objects Object” et “Plastic Chair Wood” conçues pour la Contrasts gallery à Shanghai et la famille d’objets lumineux “Chankley Bore” éditée par les Britanniques Established & Sons.
Une mise en scène pas si décalée quand on connaît l’atmosphère de ruche dans laquelle travaillent au quotidien Maarten Baas et son associé, Bas den Herder. L’un est aussi échevelé et dégingandé que l’autre, fils de pasteur, est coiffé ras et habillé sage. Ils n’en forment pas moins un duo d’enfer : Bas den Herder trouve les solutions techniques qui permettent de concrétiser les créations de Maarten. « Cette répartition des rôles est la force de ce tandem. Trop de designers ont de bonnes idées sans savoir les fabriquer », note Loïc Le Gaillard, de la Carpenters Workshop gallery à Londres. Séries limitées, pièces uniques reproductibles et commandes spéciales sont ainsi autoproduites par une dizaine d’assistants dans leur atelier d’Eindhoven.
On a découvert Maarten Baas en 2003, à sa sortie de la Design Academy, avec son projet de fin d’études “Smoke” qui a marqué de façon indélébile les esprits. Peu disert sur son travail, le designer laisse aux autres le soin de l’interpréter. D’aucuns ont vu dans ces meubles de style livrés à la crémation (et préservés dans leur fonctionnalité par une couche de résine) un trait d’arrogance et d’irrévérence vis-à-vis du passé.
Dans la foulée, une seconde série, orchestrée par le galeriste new-yorkais Murray Moss, baptisée “Where’s There’s Smoke...” qui montrait vingt-cinq classiques du design offerts à un feu rédempteur, a accentué cette idée rebelle. « En brûlant ainsi ce qui a constitué ses plus fortes influences historiques, dont Mackintosh, Rietveld ou Eames, Baas a dégagé de l’énergie pour se propulser en avant, commente Murray Moss. Il manie le chalumeau comme un ciseau à bois, il resculpte ces icônes en imposant sa propre signature. »
Li Edelkoort, directrice de la Design Academy, se souvient : « Chez Murray Moss, le défilé d’icônes du XXe siècle brûlées était extrêmement émouvant, fort comme un adieu. Le vrai génie de Maarten Baas a été d’illustrer le passage d’un siècle à un autre, ce qui l’a propulsé sur le devant de la scène. Mais son geste était au départ spontané, primitif. Il y a, chez lui, une joie de créer. » Cette dimension du plaisir est effectivement centrale dans le travail de ce designer de 30 ans. Ce que confirme le galeriste parisien Loïc Bigot : « Baas a une attitude quasi adolescente. Domine, chez lui, l’envie de s’amuser avec les formes et les matières. » C’est patent avec la série “Clay” (2006) où il met littéralement « la main à la pâte » pour modeler, comme un sculpteur, l’argile synthétique autour d’un squelette de meuble en métal. Idem avec le mobilier “Treasure” (2005) improvisé à partir de morceaux de bois récupérés dans des décharges d’usines de meubles.
Un jour, au détour d’une interview, Maarten Baas a avoué son penchant pour « la beauté de l’imperfection ». Son humour se teinte souvent d’ironie, Quand Pearl Lam de la Contrasts gallery l’invite à collaborer avec les meilleurs artisans chinois, il livre une superbe “Plastic Wood Chair”, imitant à la perfection un archétype de chaise industrielle. De la dérision encore et toujours avec ses “Chankley Bore”, d’étranges créatures échappées d’un cartoon futuriste, qui rompent à la façon d’un Mendini avec tous les standards du bon design.
« Face à ses objets, explique la galeriste milanaise Rossana Orlandi, on est instinctivement tenté de toucher pour identifier le matériau et soulever le mystère de la fabrication. Le meilleur exemple est son armoire “Sculpt”. Surdimensionnée et difforme, on la croit en bois alors qu’il s’agit de métal recouvert d’un placage bois ! »
Son air angélique cache un designer qui défend bec et ongles son indépendance, contrôle son image autant que sa production. Le succès ne lui fait toutefois pas perdre la tête, ni céder aux sirènes du marché de l’art. Comptez 1900 euros pour une chaise “Clay” et 6000 euros pour une commode pièce unique “Smoke”. De quoi se laisser tenter pour qui collectionne le design d’auteur.
2 commentaires:
Heureux de decouvrir ce blog tres varié et interessant. Sachez pourtant que Pearl Lam, la galleriste et millionnaire chinoise qui est reputee pour ses grands diners, l'est aussi pour faire feu de tout bois ( d'ou je suppose son interet pour Maarten Baas ) et ses impayés aupres des artistes français qu'elle pretend sponsoriser.
i love baas's work... it's amazing! very creative, it reminds me of great masters of design, like Gauidí, Stark, Boca do Lobo, Delightfull, Lovegrove, ...
Keep posting!
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