Dès ses balbutiements, 2009 s’annonçait comme une très riche année de cinéma. Tous les grands cinéastes, à quelques rares exceptions près, semblent s’être donné rendez-vous cette année pour livrer un nouveau film. La perspective de Cannes, la plus importante manifestation internationale cinéphile ne pouvait qu’augurer d’une sélection on ne peut plus prestigieuse. On ne s’est pas trompé ! La sélection 2009 fait la part belle à des cinéastes rompus aux us et coutumes cannoises, des auteurs tous réputés qui pour certains sont nés ici, des pointures internationales, plus ou moins populaires, mais qui sont tous portés par une cohorte de fans. Bref, Cannes 2009 ne laissera aucune place aux découvertes, ne révèlera aucun grand nom aux cinéphiles avertis. C’est une demi surprise tant Cannes avait pris un nouveau départ ces derniers temps , en laissant un large espace à des réalisateurs nouveaux. L’édition 2009 est donc très excitante, car pour chaques films, il y a de nombreuses raisons d’être au moins dès plus curieux.
I. Le club des Palmés
Ils sont rares encore les cinéastes à avoir remportés à deux reprises le plus prestigieux des prix cannois : Francis Ford Coppola, Bille August, Emir Kusturica, Shoei Imamura et les frères Dardenne. Aucun d’entre eux ne sera là pour espérer une inédite passe de trois. Ils sont en revanche quelques uns à avoir déjà triomphé une fois à Cannes.
Quentin Tarantino sera sans doute le réalisateur le plus attendu de la quinzaine. Lauréat en 1994 avec "Pulp Fiction", le cinéaste américain perpétue la tradition de sa présence à Cannes et présentera "Inglorious Basterds". Une belle montée des marches est à prévoir (Brad Pitt, Diane Kruger, Samuel L. Jackson, Maggie Cheung, Tim Roth, Mélanie Laurent) pour ce film de guerre qui permettra à Tarantino comme à son habitude, de revisiter les territoires chéris de sa propre cinéphilie. La bande-annonce, disponible depuis de nombreuses semaines déjà, est assez intriguante…
Ken Loach, palmé en 2006 pour "le Vent se lève", concourra lui avec "Looking for Eric", drame social qui permettra de faire le pont entre le culte footballistique qui entoure Eric Cantona de manière très particulière du côté de Manchester, et cette légitimité d’acteur que l’ex-joueur continue de poursuivre. Eric Cantona succède à Maradona sur les marches Cannoises. Dans "Looking for Eric", il joue son propre rôle, ce qui n’est pas forcément aisé surtout pour un projet finalement très particulier.
Lars von Trier Palme d’or 2000 pour "Dancer in the Dark", ne laisse jamais indifférent. Il ne devrait pas faillir à sa réputation avec son très attendu "Antichrist" (avec Willem Dafoe et Charlotte Gainsbourg), un film d’horreur sans aucun doute atypique. Lars von Trier est déjà l’auteur de "L’Hôpital et ses fantômes", terrifiante série TV qui nous assure les capacités du très tordu cinéaste danois pour pousser les spectateurs dans leurs retranchements. Le film sera très commenté partout au moment de sa présentation ... forcément !
Une seule femme à déjà remporté la Palme d’or. C’était en 1993 pour le sublissime "La Leçon de Piano" de Jane Campion et depuis, aucune cinéaste femme n’a pu reprendre le flambeau. Jane Campion a souvent déçu depuis son apothéose cannoise ("Holy Smoke", "In the cut"). Les attentes la concernant seront donc très mesurées. Ce qui plaide en faveur de la réalisatrice Néo-zelandaise, c’est ce retour a priori, à un style de cinéma qui lui a plutôt réussi. "Bright Star", évocation de l’histoire amoureuse et tourmentée – au XVIIIe – entre les poètes britanniques John Keats et Fanny Brawne, semble puiser dans un registre relativement proche de "Portaits de Femmes", l’adaptation par Jane Campion du roman d’Henry James, sans doute son film le plus remarquable.
II. Les éternels favoris déçus.
Parrain d’Isabel Coixet dont il a produit "Ma Vie sans moi", Pedro Almodovar rêve depuis de longues années de remporter la Palme. Son ambition est connue de tous, il ne s’en cache pas. "Tout sur ma mère" et "Volver" sont passés près du Graal mais le cinéaste ibérique ne figure toujours pas au Palmarès de cette fameuse Palme. Une nouvelle chance lui est offerte avec ses très attendues "Etreintes brisées", une histoire d’amour fou dans laquelle on retrouvera l’égérie de Pedro Almodovar, Penelope Cruz (que je n'aime pas du tout !)
Quentin Tarantino n’avait pas caché au terme de sa présidence cannoise en 2004 que, si l’attribution de la Palme n’avait tenue qu’a lui, "Old Boy" aurait été primé. L’ébouriffant cinéaste coréen Park Chan Wook se voit offrir une seconde chance. Il concourra donc (entre autre) contre Tarantino et avec Thirst ("aka", "Ceci est mon sang"), une histoire de vampires qui ne devrait pas répondre aux conventions du genre et qui devrait aussi être le prétexte à la folie visuelle dont le cinéaste est coutumier.
III. Les Français.
Le cinéma français à attendu plus de 20 ans et Laurent Cantet pour être anoblit de nouveau par Cannes. Cette années les réprésentants sont tous prestigieux, d’écoles différentes, et les garants d’un cinéma très personnel et atypique dans le paysage du cinéma français.
On commence avec Gaspar Noé, cinéaste trublion, provocateur invétéré, qui à déclenché l’hystérie d’une partie du public lors de la présentation déjà en compétition à Cannes du très exigeant "Irréversible". "Soudain le vide", tourné à Tokyo et plus ou moins dans le secret, est un film terriblement excitant pour plusieurs raisons : parce que Noé est un réalisateur rare, porteur d’une ambition de cinéma, et qui ne laisse jamais indifférent ; parce que son cinéma était jusqu’a présent sans concession mais que "Soudain le vide" semble marquer un possible basculement vers autre chose. Enfin parce que les premiers visuels du film qui nous sont parvenus depuis un an tout juste déjà, témoigne d’une ambiance et d’une virtuosité qui ne devrait pas laisser de marbre les festivaliers qui se projetterons dans le vide de Noé. Attention ca peut secouer !
Autre film dont on ressent déjà le potentiel pour une vive polémique cannoise, "Un Prophète" de Jacques Audiard, une plongée dans les milieux souterrains des banlieues parisiennes qui devrait valoir son lot de commentaires. Audiard est un des cinéastes français les plus intéressants ...
Xavier Giannoli est un habitué de Cannes. Révélé par son Interview, Palme d’or du court-métrage en 1998, Giannoli a quelque peu peiné pour nous convaincre ensuite ("Les Corps impatients" en 2003, "Une Aventure" en 2005). "Quand j’étais chanteur" en 2007, sélectionné à Cannes, marquait très certainement une étape dans l’évolution de son travail. On sent en tout cas dans ce film une certaine maturité de cinéaste. On espère la retrouver dans "A l’origine", un drame social et amoureux qui réunit François Cluzet et Emmanuelle Devos.
On retrouvera également Emmanuelle Devos dans le nouveau film d’Alain Resnais, "les Herbes folles". L’actrice y cotoiera la fidèle troupe de comédiens dans l’univers de Resnais : André Dussolier, Sabine Azéma etc. Le film est l’adaptation d’un roman de Christian Gailly qui devrait offrir le terrain idéal pour les malices habituelles de Resnais.
IV. Les autres cinéastes de la compétition.
Brillante Mendoza, chef de fil du renouveau du cinéma Philippin, s’était fait remarqué l’année dernière à Cannes avec "Serbis". Le revoilà cette année avec "Kinatai". Aucune véritable information ne circule encore sur ce film. Le cinéaste du très beau John-John peut très bien créer la surprise..
Le plus éminent cinéaste palestinien Elia Suleiman est lui aussi de retour à Cannes cette année. Le cinéaste avait reçu le prix du jury en 2002 pour "Intervention Divine". "Le Temps qu’il reste", introspection politique sur la place de la Palestine dans le monde, permettra de rediscuter à Cannes des politiques du Proche-Orient, un an après "Valse avec Bashir".
Le cinéaste chinois Lou Ye devrait lui s’assurer de nouveau les foudres du pouvoir politique chinois. Dans la collimateur depuis la présentation à Cannes en 2003, sans autorisation de la censure de son pays, de "Une Jeunesse Chinoise", Lou Ye revient cette année. "Nuit d’ivresse printanière" à même toutes les chances de provoquer l’ire de ses censeurs, tant le film semble bousculer quelques tabous, notamment autour de la sexualité ...
Autre cinéaste asiatique, mais exilé depuis longtemps déjà aux Etats-Unis, le Taïwannais "Ang Lee" offrira aux festivaliers cannois ce qui devrait être le film le plus rock’n roll de la quinzaine. "Talking Woodstock" évoquera bien évidemment le célèbre festival et l’époque hippie de la fin des années 60’s. Au casting, Emile Hirsch, souvent dans les bons coups ("Into the wild", "Speed Racer", "Harvey Milk" etc.)
Terminons notre panorama concernant les seuls films de la sélection officielle, avec Marco Bellochio, le très expérimentés cinéaste transalpin, seul représentant de sa cinématographie pour cette édition, un an seulement après les succès de "Gomorra" et de "Il Divo". Le film de Bellochio ne devrait rien à voir avec ces deux films là mais s’annonce pour le moins prometteur tant Bellochio ne nous paraît jamais autant à l’aise que lorsqu’il revisite l’histoire de l’Italie, en témoigne par exemple "Buongiorno Notte". Avec "Vincere", Bellochio s’intéresse cette fois à Mussolini à travers cette histoire d’Ida Dalser, la maîtresse du Duce. Le personnage en question sera incarnée par la très belle Giovanna Mezzogiorno ("Juste un baiser", "La Bête dans le coeur", "La fenêtre d’en face" etc.)
V. Hors-Compétition
Le festival de Cannes s’est offert le luxe du dernier films des studios Pixar pour l’ouverture de sa 62e édition avec "Là-Haut". Le label Pixar, c’est en théorie la garantie d’un vrai bon moment de distraction, d’un film léger, drôle et intelligent, à la fois pour les petits et les grands. En clair, la promesse de lancer les festivités sous les plus beaux augures.
En conclusion, lorsque tous les festivaliers seront éreintés par la sommes des projections de la quinzaine, Cannes s’offre le petit risque d’une double overdose. C’est le film de Jan Kounen, "Coco Chanel et Igor Stravisky", qui aura les honneurs de clore le festival. La double overdose, c’est simplement parce que ce projet s’ajoute au téléfilm de France 2 diffusé il y a quelques semaines et consacré à la coutûrière, mais aussi et plus encore au film "Coco avant Chanel" d’Anne Fontaine, actuellement dans les salles. Jan Kounen fait lui une nouvelle fois le grand écart, son dernier film vu restant "99F", lui même arrivant après "Blueberry". En tout cas, Chanel correspond évidemment à une image de Cannes que Cannes ne pouvait pas snober.
Un an après son décès, le souvenir de Heath Ledger est plus que jamais vivace, principalement grâce à la formidable impression laissée l’été dernier par "The Dark Knight" de Christopher Nolan. Heath Ledger sera mis à l’honneur de Cannes par ce qui restera son dernier film, l’"Imaginarium du Docteur Parnassus" de Terry Gilliam. Heath Ledger est décédé pendant le tournage de ce film, ce qui à évidemment incité Gilliam à revoir ses plans. Le film est d’autant plus une curiosité. Un Terry Gilliam fait de toute façon toujours l’évènement et… la montée des marches sera royale : Johnny Depp, Jude Law, Colin Farrell etc.
Nous n’avions plus de nouvelles d’Alejandro Amenabar, le petit génie du cinéma ibérique, depuis "Mar Adentro" en 2005. Le cinéaste est depuis reparti à Hollywood – ou il avait déjà tourné Les Autres - et à réalisé "Agora", un péplum avec Rachel Weisz, l’héroïne de… "La Momie" !
Le cinéaste marseillais Robert Guédiguian livrera lui "L’Armée du Crime", une fresque historique très personnelle dans laquelle il rendra hommage aux résistants arméniens du réseaux Manouchian fusillés au crépuscule de la seconde Guerre Mondiale.
VI. Sélection
Longs métrages en Compétition
* À L'ORIGINE réalisé par Xavier GIANNOLI
* ANTICHRIST réalisé par Lars VON TRIER
* BAK-JWI (THIRST, CECI EST MON SANG...) réalisé par PARK Chan-Wook
* BRIGHT STAR réalisé par Jane CAMPION
* CHUN FENG CHEN ZUI DE YE WAN (NUITS D'IVRESSE PRINTANIÈRE) réalisé par LOU Ye
* DAS WEISSE BAND (LE RUBAN BLANC) réalisé par Michael HANEKE
* ENTER THE VOID (SOUDAIN LE VIDE) réalisé par Gaspar NOÉ
* FISH TANK réalisé par Andrea ARNOLD
* INGLOURIOUS BASTERDS (INGLOURIOUS BASTERDS) réalisé par Quentin TARANTINO
* KINATAY réalisé par Brillante MENDOZA
* LES HERBES FOLLES réalisé par Alain RESNAIS
* LOOKING FOR ERIC réalisé par Ken LOACH
* LOS ABRAZOS ROTOS (ETREINTES BRISEES) réalisé par Pedro ALMODÓVAR
* MAP OF THE SOUNDS OF TOKYO (CARTE DES SONS DE TOKYO) réalisé par Isabel COIXET
* TAKING WOODSTOCK réalisé par Ang LEE
* THE TIME THAT REMAINS réalisé par Elia SULEIMAN
* UN PROPHÈTE réalisé par Jacques AUDIARD
* VENGEANCE réalisé par Johnnie TO
* VINCERE réalisé par Marco BELLOCCHIO
* VISAGE réalisé par TSAI Ming-Liang
Un Certain Regard
* À DERIVA réalisé par Heitor DHALIA
* AMINTIRI DIN EPOCA DE AUR réalisé par Hanno HÖFER, Razvan MARCULESCU, Cristian MUNGIU, Constantin POPESCU, Ioana URICARU
* DEMAIN DÈS L'AUBE réalisé par Denis DERCOURT
* EYES WIDE OPEN (EINAYM PKUHOT) réalisé par Haim TABAKMAN
* INDEPENDENCIA (INDEPENDENCIA) réalisé par Raya MARTIN
* IRÈNE réalisé par Alain CAVALIER
* KASI AZ GORBEHAYE IRANI KHABAR NADAREH réalisé par Bahman GHOBADI
* KUKI NINGYO réalisé par KORE-EDA Hirokazu
* KYNODONTAS (CANINE) réalisé par Yorgos LANTHIMOS
* LE PÈRE DE MES ENFANTS réalisé par Mia HANSEN-LØVE
* LOS VIAJES DEL VIENTO (LES VOYAGES DU VENT) réalisé par Ciro GUERRA
* MORRER COMO UM HOMEM (MOURIR COMME UN HOMME) réalisé par João Pedro RODRIGUES
* MOTHER réalisé par BONG Joon-Ho
* NANG MAI (LA NYMPHE) réalisé par Pen-Ek RATANARUANG
* POLITIST, ADJECTIV (POLICIER, ADJECTIF) réalisé par Corneliu PORUMBOIU
* PRECIOUS réalisé par Lee DANIELS
* SAMSON AND DELILAH réalisé par Warwick THORNTON
* SKAZKA PRO TEMNOTU (CONTE DE L’OBSCURITE) réalisé par Nikolay KHOMERIKI
* THE SILENT ARMY (L'ARMÉE SILENCIEUSE) réalisé par Jean VAN DE VELDE
* TZAR (LE TSAR) réalisé par Pavel LOUNGUINE
Hors Compétition
* AGORA (AGORA) réalisé par Alejandro AMENABAR
* COCO CHANEL & IGOR STRAVINSKY réalisé par Jan KOUNEN
* DRAG ME TO HELL (JUSQU'EN ENFER) réalisé par Sam RAIMI
* L'ARMÉE DU CRIME (L'ARMÉE DU CRIME) réalisé par Robert GUÉDIGUIAN
* NE TE RETOURNE PAS (NE TE RETOURNE PAS) réalisé par Marina DE VAN
* PANIQUE AU VILLAGE (PANIQUE AU VILLAGE) réalisé par Vincent PATAR, Stéphane AUBIER
* THE IMAGINARIUM OF DOCTOR PARNASSUS (L'IMAGINARIUM DU DOCTEUR PARNASSUS) réalisé par Terry GILLIAM
* UP (LÀ-HAUT) réalisé par Pete DOCTER
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