dimanche 11 janvier 2009

La Mk 2 et l'avènement d'un chef d'œuvre

C'est dans le cadre du Salon d'Earl's Court, en octobre 1959, qu'est présentée la Mk 2, où elle est proposée dans les trois cylindrées de 2,4 litres, 3,4 litres et 3,8 litres. Les retouches apportées à un design originel se traduisent généralement par la dégénérescence des formes. Au contraire, Jaguar a réussi à moderniser la ligne de la Mk 1 tout en conservant à la nouvelle voiture le caractère de son aînée. En allégeant les lignes du pavillon, la marque est même parvenue à lui donner un nouvel élan esthétique.

De fins encadrements de vitres en laiton chromé et une lunette arrière élargie transforme l'habitacle en lui apportant un supplément de lumière. Ceci donne naissance à un nouveau panneau de custode échancré par les larges déflecteurs arrière, dont la courbe vient frôler celle de la lunette. Sur la face avant, des phares antibrouillard viennent en lieu et place des grilles de la Mk 1, tandis que des clignotants circulaires apparaissent sur le devant des ailes, désormais surmontées d'une petite veilleuse. Les feux arrière légèrement plus volumineux constituent la seule modification apportée à la poupe.

Original et intemporel, le design de la voiture s'inscrit toutefois dans la filiation esthétique de la marque depuis 1948. A l'image de l'XK 120, sa glorieuse et sportive aînée, la Mk 2 offre un concerto de courbes et de galbes, une partition dans laquelle brille Jaguar. Aucune mièvrerie dans ces rondeurs, bien au contraire. La Mk 2 compose un cocktail racé d'agressivité et de douceur qui fait son charme.

Véritable salon roulant, l'habitacle offre un festival dont profitent tous les sens. Si le regard et le toucher sont comblés par les boiseries, l'odorat ne se trouve pas moins flatté par le parfum du cuir. Les jambes trouvent généreusement leur place à l'avant comme à l'arrière, quoique la surface plane des larges et confortables sièges ne favorise pas le maintien latéral. Le passager se trouve-t-il passablement malmené par la force centrifuge… Le capot plongeant offre une excellente visibilité qui s'étend sur les côtés et vers l'arrière grâce aux vitres en arc de cercle et à la lunette panoramique. Le regard tombe droit sur le compte-tours et le tachymètre, alors que le tableau de bord central regroupe les cadrans de température d'eau et de pression d'huile, ainsi que la jauge d'essence et l'ampèremètre.

De puissantes mais lourdes berlines
Sur les petites routes, le poids de cette superbe " saloon " se fait lourdement sentir. Pour vaincre son inertie, il importe de la balancer énergiquement pour lui faire digérer les enchaînements de virages à la géométrie tourmentée. Dans cet exercice, le train arrière peu enclin à la discipline ne manque pas de nous gratifier de quelques figures sous l'effet du couple. Et sur les portions de chaussée dégradée passées à vive allure, l'essieu rigide se signale par de vifs écarts. Très démultipliée et manquant de précision, la direction ne favorise pas le contrôle du survirage, d'autant que le grand volant en bakélite oblige à jouer les moulins à vent - mouvements très pénalisants en conduite sportive. Non assistée sur la voiture de notre essai, cette direction se révèle également d'une grande dureté en manœuvres, lesquelles ne se trouvent guère améliorées pas le médiocre rayon de braquage.

Grande routière capable de moyennes élevées, la Mk 2 3,8 litres soutient sans broncher les 170 km/h dans le confort précieux et les effluves enivrants de ses cuirs. Vitesse à laquelle le moteur ne dépasse pas les 4500 tr/mn. Néanmoins, il convient de ne pas se méprendre. Très rapide et jouissant d'une mécanique à la générosité légendaire, la Mk 2 ne saurait être considérée comme un modèle réellement sportif. Son comportement routier ne s'y prête guère et, avec la transmission, il constitue sans doute le secteur où la voiture révèle son âge. Ceci ne saurait affecter sérieusement les formidables qualités qui étaient les siennes à son époque, et l'on ne saurait lui reprocher ce pourquoi elle n'a pas été conçue. Dieu merci, il y avait ce qu'il fallait dans la gamme Jaguar pour assouvir sa passion de la voiture de sport…

Nous avons également essayé une 340, qui, se trouvant être l'une des dernières fabriquées, a reçu une boîte de vitesses de XJ 6 de présérie. Quel plaisir de conduire une Mk 2 (ou assimilée) dotée d'une première synchronisée et d'une seconde non récalcitrante ! L'agrément s'en trouve considérablement amélioré et il devient alors possible de tirer la meilleure partie des ressources du moteur XK.
Le comportement routier de la voiture se trouve sensiblement amélioré par une direction assistée plus franche. La différence de puissance par rapport au 3,8 litres se révèle peu perceptible, et tout au plus peut-on ressentir une souplesse légèrement inférieure. Sensiblement modernisée, en particulier grâce à une transmission enfin digne de son moteur, cette dernière évolution de la génération Mk 1-Mk 2 offre un agrément de conduite en progrès qui s'accompagne d'une élévation du niveau des performances.

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