jeudi 29 janvier 2009

"Un conte de Noël"

À l’origine, Abel et Junon eurent deux enfants, Joseph et Elizabeth. Atteint d’une maladie génétique rare, le petit Joseph devait recevoir une greffe de moelle osseuse. Elizabeth n’était pas compatible, ses parents conçurent alors un troisième enfant dans l’espoir de sauver Joseph. Mais Henri qui allait bientôt naître, lui non plus, ne pouvait rien pour son frère - et Joseph mourut à l’âge de sept ans.
Après la naissance d’un petit dernier, Ivan, la famille Vuillard se remet doucement de la mort du premier-né.
Les années ont passé, Elizabeth est devenue écrivain de théâtre à Paris. Henri court de bonnes affaires en faillites frauduleuses, et Ivan, l’adolescent au bord du gouffre, est devenu le père presque raisonnable de deux garçons étranges. Un jour fatal, Elizabeth, excédée par les abus de son mauvais frère, a "banni" Henri, solennellement.
Plus personne ne sait exactement ce qui s’est passé, ni pourquoi. Henri a disparu, et la famille semble aujourd’hui dissoute. Seul Simon, le neveu de Junon, recueilli par sa tante à la mort de ses parents, maintient difficilement le semblant d’un lien entre les parents provinciaux, la sœur vertueuse, le frère incertain et le frère honni…

"Un Conte de Noël" commence avec la réapparition de la maladie qui avait emporté le petit Joseph : Junon apprend qu’elle est atteinte d’une leucémie qu’aucune chimiothérapie ne pourrait guérir. Il lui faut maintenant trouver un donneur de moelle potentiel parmi les membres de sa famille. Enfants et petits-enfants se mettent chacun à effectuer les tests. Et Paul, le fils d’Elizabeth, l’aîné des petits-enfants, adolescent torturé, se laisse déborder par l’angoisse.
Noël approche. Toute la famille se réunit pour trois jours dans la grande maison parentale à Roubaix.
Convié par Paul, même Henri a accepté l’invitation et vient accompagné de sa nouvelle conquête : Faunia. Claude, le mari d’Elizabeth, les rejoindra plus tard…
L’heure serait aux règlements de compte, pourtant, la situation s’apaise. Et le monde s’enchante. Sylvia apprend les sentiments que Simon éprouve pour elle depuis des années. A-t-elle vraiment vécu sa vie, ou n’en a-t-elle connu que la pâle illusion ?
Junon acceptera-t-elle une greffe dangereuse pour soigner une maladie qui ne se développera peut-être jamais ?
Claude, le père de Paul, acceptera-t-il que son fils donne sa moelle à sa grand-mère et risque ainsi de porter la responsabilité de sa mort ? Quant à Elizabeth et Henri, que faire d’une dispute qui a perdu toute raison ?

Le film d'Arnaud Desplechin est une véritable symphonie mythique, abordant le thème le plus universel aux yeux de l'homme : la famille. Drôle, cynique, grinçant et émouvant, le film propose une valse virtuose mélangeant tous les sentiments humains pour un résultat éblouissant. Mais le meilleur réside en son message, où chacun prend ce qu'il veut selon ses idées, laissant la plus grande liberté que l'on puisse donner à son spectateur. Il en résulte une profondeur de réflexion immense, à l'infinie indéfinissable. D'ailleurs, de nombreux sujets sont abordés. La maladie prend alors une place considérable dans ce long-métrage et pose la réflexion juste de son rapprochement non seulement avec la famille mais avec autrui. Elle signale la fin d'une existence éphémère qui pose par fatalité l'une des questions les plus importantes du film : la maladie est-elle un moyen pour une famille de se retrouver et ainsi de se reconstruire par ces derniers moments de vies ? La question peut paraître absurde car inimaginable. Mais son engagement libre fait que beaucoup de gens s'y retrouvent. D'ailleurs, le film est construit sur cette idée : chaque individu comparera sa famille à celle de ce film. Celui-ci fera de nombreux rapprochements passés, présents et futurs pour se poser les questions qu'il trouvera nécessaires à son avancement au sein de son cerle familial. Mais où le cinéaste enfonce le clou de son talent, c'est que l'on trouve dans toute cette histoire un second degré explosif, tout simplement jubilatoire. Entre-autre, l'ironie baigne dans cet anti-conte par excellence. Et de ce fait, on pense beaucoup à la scène où Catherine Deneuve et Mathieu Amalric se font leurs confidences. Culte et hilarant. Et c'est finalement cet humour, ces émotions mélancoliques et nostalgiques, parfumés de cynisme, qui ont fait de ce "conte de Noël" un des meilleur film de l'année 2008. Extraordinaire, talentueux.

En veine de boutade, Arnaud Desplechin a dit un jour qu'il avait tourné "La Vie des morts" pour dire du mal de sa famille, "La Sentinelle" pour dire du mal de son pays, "Comment je me suis disputé... (ma vie sexuelle)" pour dire du mal de ses anciennes petites amies. Dans "Un conte de Noël" , le cinéaste dit du mal de lui-même.

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